Moi qui pourtant suis tant du soir, j'ai voulu voir Le matin. Percer la brume que la ville, encor fébrile, Retient Comme un drap tissé de sommeil, que le soleil Déchire Et ses lambeaux s'effilochant, trop loin des champs, Soupirent.
On n'entend pas le chant de la biche à son faon Pour qu'à l'orée du pré ils goûtent la rosée, Ni du hibou le cri de son retour au nid. Muet, le corbeau noir qui depuis son perchoir Coasse d'habitude bien avant les laudes En ville on n'a pas l'aube des campagnes prudes.
Sans colline et sans tours, les nues les ont happés, La ville est sans contours, les humains sans repères. Ce matin les vapeurs des forêts échappées Apportent les odeurs et le recul appert Qui nous rappelle à l'ordre de nos origines. Nos ciments peuvent mordre et dissiper nos peines, L'acier peut élever nos fiertés citadines… Nos cœurs peuvent couver toujours l'espoir des plaines !
Une fois me suis-je endormi avant minuit Et serein ;
Moi qui pourtant suis tant du soir, j'ai le pouvoir Du matin.
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