Une île au sud du monde
« Chili, où se termine la terre, disaient les anciens aimaraes (peuple de la région du lac Titicaca, NDLA). Et ils avaient raison – à moins que ce ne soit là où elle commence. Sur une superficie de 750 000 km², le Chili étend son territoire face à la mer en une offrande immobile. 1
Tournant le dos aux Amériques, éloigné de toute voie commerciale qui lui aurait fait tourner la tête vers l’Europe, il est resté là, contemplant l’infini de l’océan comme s’il y avait perdu quelque chose qui lui fut autrefois, ou même encore aujourd’hui, vital.
Comme un naufrage abandonné sur cette côte sans ressources, il suivait du regard le bateau qui s’éloignait sans le voir, et l’a laissé se perdre sur l’horizon sans vouloir changer de posture. Car à la vérité, il faudrait bien parcourir la moitié du monde pour trouver une autre terre habitable derrière cet horizon des mers. »
Benjamín Subercaseaux

Pour connaître et valoriser en profondeur le patrimoine du Chili et de l’Araucanie, il est essentiel de comprendre d’abord l’endroit géographique singulier où se trouve le territoire chilien au sein de l’Amérique du Sud et du monde.
Ne serait-ce que par sa situation et sa forme, le Chili interpelle :
c’est le pays le plus étendu et le plus étroit de la Terre, avec 4 337 km de long et 177 km de largeur moyenne (IGM, 2010), avec une extension climatique exceptionnelle qui va de latitudes subtropicales au nord à des régions australes au sud.

« Tout est là : calvitie géologique, jungle profonde, vergers, neiges et ultimes plaques de glace… »
Gabriela Mistral, 1941

Aux origines du nom de l’Araucanie…
Depuis les débuts de la conquête espagnole, les Mapuche reçurent la dénomination de « araucanos », nom popularisé par Alonso de Ercilla et son œuvre fameuse La Araucana (1568). Puis, par extension, tout le territoire principal habité par les Mapuche, ou « araucanos », entre les rivières Bio-Bio au nord et Toltén au sud, a été appelé ainsi.
Il y eut cependant de nombreuses controverses quant à l’origine du terme araucano. (…) Pour certains, il dérive de « auca », qui, en quechua, signifie « rebelle », allusion au caractère belliqueux et indomptable dont ont fait preuve les Mapuches face aux troupes de l’Empire inca, lors d’une tentative d’invasion au XVe siècle.
Pour d’autres, cela viendrait de « Rag-co », qui par déformation a donné « arauco », et qui, en mapudungún, la langue mapuche, signifie « zone d’eau argileuse », en référence à un secteur habité par les Mapuche au nord-ouest de ce qui est aujourd’hui l’Araucanie.
Le terme Araucano, avec le temps, est devenu synonyme de Mapuche, puis en vint à désigner tous ceux qui parlaient la langue et pratiquaient la culture mapuche, s’étendant ainsi non seulement aux habitants de l’Araucanie en tant que telle, mais aussi à tous les peuples indigènes qui habitaient le centre-sud du Chili.
Finalement, la dénomination d’araucanos s’est étendue aussi à tous les peuples indigènes de la Cordillère du sud du Chili et de la Pampa argentine, qui avaient acquis cette langue et cette culture aux contacts fréquents avec les groupes mapuches de l’Araucanie. Ceux-ci organisèrent en effet de nombreuses excursions dans les pampas orientales au XVIIIe siècle à la recherche de bétail, lequel abondait à cette époque dans ces régions d’Argentine. (Casamiquela, 1985).

j’ai pu profiter d’une vue aérienne pour étudier le terrain…
Le Chili est une véritable île biogéographique, confinée à l’extrême austral du monde et séparée de l’Amérique du Sud et des autres continents par de formidables barrières naturelles : à l’est par les Andes, à l’ouest par l’océan pacifique, au nord par le désert d’Atacama et au sud par la mer de Drake et les glaces de l’Antarctique.
Cette isolation marquée, établie il y a des millions d’années par des phénomènes géologiques et climatiques, est un facteur fondamental pour expliquer la biodiversité naturelle unique que présente l’Araucanie et le sud du Chili.
D’un point de vue historique et culturel, cette singulière situation géographique a également été un facteur important dans l’évolution et la formation des peuples originaires et les communautés humaines qui ont peuplé le Chili de la préhistoire à nos jours.


Il y a trois pièces : une grande en bas avec le poêle et une mezzanine ouverte en haut d’un petit escalier. La salle de bain, avec l’eau chauffée au soleil ou par le poêle, est rajoutée dans l’appentis.

- Textes et citations extraits du livre « Araucanía Chile, Patrimonio natural y cultural de sus territorios« , de Manuel Gedda Ortíz, éditions Pehuen, 2011 (à part les légendes des photos…). La traduction est de mon fait. ↩︎

