Apprendre les tissages, c’est de l’apprentissage !
Raranga est l’art de tresser chez les Maori.
Cet art leur sauva la vie lorsqu’ils furent les premiers à débarquer au Pays du Long Nuage Blanc, où le climat était bien plus rude que là d’où ils venaient. Ils purent rapidement se fabriquer des vêtements, ou korowai, avec un plante locale, le lin de Nouvelle-Zélande.

Aujourd’hui, je veux que Raranga soit l’art de tresser autre chose que des vêtements.
Tressons du lien. Un lien, entre les cultures, entre les âges.
Lier les points communs, délier les poings serrés ;

(Photo : James Heremaia)
Rapprocher les points forts, effacer les points finaux ;
Ouvrir les guillemets pour écouter le monde ;

Ouvrir les esprits.


A quelque 6 000 mètres au-dessus de la plaine côtière caraïbe de Colombie, les descendants de l’ancienne civilisation de Tayronas ont trouvé refuge dans un paradis suspendu de la Sierra Nevada de Santa Marta, lorsque l’envahisseur espagnol soumettait le continent. Ce sont les Kogis, les Arhuacos et les Wiwas.
Là encore, on retrouve dans leur mythologie préservée la puissante symbolique du tissage. La Grande Mère a créé les montagnes en filant ses pensées, tissant les neuf couches de l’univers.
Pour stabiliser le monde, elle a planté son fuseau dans son axe et élevé le massif. Puis, avec une longueur de fil de coton, elle a délimité le monde civilisé en traçant un cercle autour de la Sierra Nevada, qu’elle a attribuée à ses enfants.

Le métier à tisser, le filage, l’idée d’une communauté tissée dans le paysage sont pour ces peuples des métaphores vivantes qui guident et dirigent leur existence en toute conscience.
Les sillons dans leurs jardins, creusés pour cultiver la terre, sont à l’image d’un tissu. Lors des prières, tous tiennent des petits bouts de coton, symboles de la Grande Mère qui leur a appris à tisser. Ils sont les héritiers et protecteurs de ce qu’elle a tissé.
(Extraits du livre de Wade Davis, Notre Monde a besoin de la sagesse ancestrale (Albin Michel, 2021)

